Nous nous sommes mises d'accord avec Vanessa (Allemande) pour aller trois jours voir le désert tout au bout de la péninsule de la Guajira. 

Nous ne le savions pas encore à ce moment-là mais nous nous lancions dans une véritable aventure. Il a fallu rejoindre Riohacha, ville de départ de la boucle que nous avions prévu. Nous débarquions dans un environnement parfaitement différent des étapes précédentes... entre la chaleur moite et l'animation bourdonnante dans la rue, de jour comme de nuit, la ville est digne d'un Vietnam ou d'un Cambodge. Etals d'objets en tout genre, vendeurs de fruits gueulant leurs prix, bric à brac de frippes, klaxons incessants, motos dans tous les sens, bordel incroyable, voilà la photo de Riohacha en descendant du bus.

Si Cartagena est riche et civilisée, Riohacha et sa péninsule offrent une toute autre expérience de la Colombie. Et c'est bien cela que je cherche à découvrir en voyageant, la palette complète de couleurs, le plateau entier de fruits, la discographie intégrale de chaque pays.


Nous ne nous sommes pas atardées à Riohacha car nous visions le désert. Dès le lendemain matin, nous avons pris un taxi jusqu'à Uribia, village emblématique des communautés indigènes de la Colombie. Nous devions attraper un collectivo qui nous amène à Cabo de la Vela. Très vite un monsieur nous a vendu un ticket et nous avons attendu la fin du chargement de la jeep... plus d'une heure plus tard, avec deux mètres de hauteur de vivres sur le toit et les pneus surgonflés, nous sommes finalement partis, serrés comme des sardines à l'arrière, sur une route qui n'en était pas une. 


Je me suis fait une idée de ce que pourrait être l'Afrique dans ce paysage désert de Colombie. Très régulièrement, des enfants barraient le chemin avec des cordes pour demander de l'argent ou je ne sais quel droit de passage. Ils sortaient de nul part. Je me demandais ce qu'il se serait passé si le chauffeur ne les connaissait pas ou s'il ne leur donnait rien... j'étais contente de ne pas le savoir.

Les chèvres paissaient le long de la voie, les cactus et buissons tous secs s'enchainaient. Tout ce paysage défilait lentement, au fur et à mesure que la jeep avalait les kilomètres et la poussière.

Et puis soudainement, le pneu arrière a crevé. La voiture a chancelé et le chauffeur a réussi à stopper l'embarcation sans plus de mal. "C'était sûr", j'ai pensé..; Nous avons fini sur la jante, nous avons eu bien peur, et véritablement nous avons eu beaucoup de chance de ne pas nous retrouver sur le toit. Avec tout le poids que supportaient les roues sur cette route de misère, on l'avait bien vu venir. Le pneu était éclaté sur toute sa longueur, c'était impressionnant ! 

Les types ont trouvé un moyen de changer la roue, sans plus d'inquiétude, façon mac gyver, avec une allumette et un bout de ficelle... Nous avons patienté une heure en plein soleil, le temps de changer la roue, et nous sommes repartis. 


Dix minutes plus tard, nouvel épisode adrénaline : cette fois tout le monde a vite sauté de la jeep. Une bouteille de gaz fuyait dangereusement sur le toit ! Quelqu'un l'a évacuée et placé loin de nous en queques secondes, et nous avons de nouveau attendu, jusqu'à ce qu'elle se soit vidée entièrement.


Il restait encore une heure de trajet théorique. Mais les gars ont fait leurs livraisons à chaque casa, et c'est seulement vers 16h que nous sommes finalement arrivées à Cabo de la Vela, après une bonne journée dans la jeep...

Nous n'avions donc plus qu'1h30 de soleil devant nous pour visiter Cabo. J'étais un peu frustrée de ne pas pouvoir profiter plus longtemps, mais au moins nous avions vécu une véritable aventure, partageant le quotidien des habitants de la Guajira, qui parcourent dangereusement de longues distances sur une terre battue, avec bien peu de moyens... Ici le ton était donné, le tourisme n'était pas encore vraiment bien développé, on faisait avec les moyens du bord. 


A Cabo, nous avons donc rapidement pris une moto qui nous a amené voir les points de vue du village. Sunset sur la côte, c'était magnifique.

Je te garantis pourtant que le meilleur moment de la journée fut lorsque nous avons finalement ouvert une bière bien fraiche.

Nous avons dormi sur la plage, dans de grands hammacs appelés chinchorros, tout juste abrités du vent par trois murs en paille. A la bien !

 

Le lendemain, nous avions rendez-vous à 5h00 pour partir à Punta Gallinas, la pointe à l'extrême nord de la péninsule, et finalement de la Colombie. A 5h45 (ahah), la jeep est arrivée pour nous récupérer et nous avons pris le départ. Looooong fut le trajet sur la terre désertique et cabossée. Mais le paysage durant le voyage et à l'arrivée en valait la peine. Dunes de sable et mer turquoise nous ont récompensées du voyage. La vue était parfaite.

Nous avons pu nous baigner dans une eau chaude et claire pour quelques heures, profiter d'une nuit étoilée incroyable, remplie de plein d'étoiles filantes, un sunset et un sunrise superbes, aux couleurs qui effacent les heures de souffrances d'un 4x4 dans les nids de poules.


Et il a fallut revenir au point de départ déjà dès le jour suivant. Cette fois encore nous avons eu notre lot d'aventures. Au milieu du parcours, le chauffeur a cru bon tenter de passer un 4x4 de deux tonnes dans un marécage. Prudent, il a quand même testé le passage avant, pour être sûr, en passant... à pied ! Comme si ses 80kg allaient être représentatifs ! Évidemment nous sommes restés coincés tu te doutes bien !

Il a donc fallu sortir de la jeep, les pieds dans la boue pour permettre de la tracter hors de la mare (pas si facile) et repartir. Nous avions subi tellement de rebondissements sur le trajet, sans clim, à 11 dans le véhicule, à se faire arrêter tous les trois kilomètres par l'habitant du coin qui voulait sa taxe.... notre patience mise à l'épreuve, nous avons fini par craquer et....de désespoir, beaucoup rigoler !


Pas sûre que je revienne de sitôt à la Guajira. Mais tu sais quoi ? Je suis bien contente d'avoir fait ce voyage et je ne regrette rien. J'ai adoré le fait que, pour quelques instants de pur bonheur et d'infinie beauté, pour le plaisir de m'être retrouvée quasiment seule dans le désert sur ces plages idylliques, j'ai du traverser toute cette aventure et ces péripéties, avoir cette adrénaline et endurer ces trajets uniques.


Car en conclusion, La Guajira est un trésor qui se mérite.